Fundamento destacado: ALORS QUE les dispositions relatives à la responsabilité du fait des produits défectueux s’appliquent à la réparation du dommage supérieur à un montant déterminé par décret, qui résulte d’une atteinte à un bien autre que le produit défectueux lui-même ; qu’un produit est défectueux lorsqu’il n’offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre, c’est-à-dire lorsqu’il risque de porter atteinte à l’intégrité physique ou psychique des individus, ou bien de provoquer la destruction ou la dégradation d’un bien ; qu’en retenant, pour juger que la preuve de la défectuosité des produits de la société Brenntag n’était pas rapportée, qu’aucun danger anormal et excessif caractérisant un défaut de sécurité desdits produits n’est établi dès lors que la pollution des vins traités n’est pas de nature à nuire à la santé des consommateurs ni à leur intégrité, le vin restant inoffensif s’il est ingéré même si son goût s’avère désagréable, quand l’altération du goût des vins en raison de leur pollution par les produits en cause caractérisait un défaut de sécurité du produit, la cour d’appel a violé les articles 1386-2 et 1386-4 du code civil, désormais articles 1245-1 et 1245-3 dudit code. Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour la société Domaine du Moulin à l’or, demanderesse au pourvoi incident.
Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 9 décembre 2020, 19-17.724, Publié au bulletin
Cour de cassation – Chambre civile 1
- N° de pourvoi : 19-17.724
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du mercredi 09 décembre 2020
Décision attaquée : Cour d’appel de Dijon, du 02 avril 2019
Président
Mme Batut
Avocat(s)
SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Didier et Pinet, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant:
CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 9 décembre 2020
Cassation partielle
Mme BATUT, président
Arrêt n° 770 FS-P
Pourvoi n° G 19-17.724
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 DÉCEMBRE 2020
La société Filtration services, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] , a formé le pourvoi n° G 19-17.724 contre l’arrêt rendu le 2 avril 2019 par la cour d’appel de Dijon (1re chambre civile), dans le litige l’opposant:
1°/ à la société AIG Europe, société anonyme, dont le siège est […], venant aux droits de la société AIG Europe Limited, ayant un établissement […],
2°/ à la société Brenntag, société anonyme, dont le siège est […],
3°/ à la société Groupe Pierre Le Goff, société anonyme, dont le siège est […],
4°/ à la société Generali IARD, société anonyme, dont le siège est […],
5°/ à la société Domaine du Moulin à l’or, entreprise unipersonnelle agricole à responsabilité limitée, dont le siège est […],
défenderesses à la cassation.
La société Domaine du Moulin à l’or a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l’appui de son recours, le moyen de cassation annexé au présent arrêt.
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l’appui de son recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Kloda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la société Filtration services, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société AIG Europe et de la société Brenntag, de la SCP Didier et Pinet, avocat de la société Domaine du Moulin à l’or, de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat des sociétés Groupe Pierre Le Goff et Generali IARD, l’avis écrit de M. Sudre, avocat général, et l’avis oral de M. Lavigne, avocat général, après débats en l’audience publique du 20 octobre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, Mme Kloda, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, Mme Teiller, MM. Avel, Mornet, Chevalier, Mmes Kerner-Menay, Darret-Courgeon, conseillers, M. Vitse, Mmes Dazzan, Le Gall, M. Serrier, Mmes Champ, Comte, Robin-Raschel, conseillers référendaires, M. Lavigne, avocat général, et Mme Randouin, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt;
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Dijon, 2 avril 2019), la société Domaine du Moulin à l’or a confié la filtration, le dégazage et l’électrodialyse de l’ensemble de ses vins millésimés 2014 à la société Filtration services, qui a fait appel pour la préparation de l’appareil d’électrodialyse à la société Eurodia ayant utilisé à cet effet de l’acide nitrique et de la lessive de soude, acquis par la société Filtration services auprès de la société Groupe Pierre Le Goff (le vendeur) et produits par la société Brenntag (le producteur). A l’issue des opérations, une pollution des vins a été décelée provenant de la lessive de soude et de l’acide nitrique et provoquant des désordres organoleptiques.
2. Les sociétés Domaine du Moulin à l’or et Filtration services ont assigné en responsabilité et indemnisation le producteur et le vendeur, ainsi que leurs assureurs respectifs, les sociétés Generali IARD, et AIG Europe Limited, aux droits de laquelle vient la société AIG Europe. Le vendeur a été mis hors de cause.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi principal
Enoncé du moyen
3. La société Filtration services fait grief à l’arrêt de rejeter ses demandes, alors que «les dispositions relatives à la responsabilité du fait des produits défectueux s’appliquent à la réparation du dommage supérieur à un montant déterminé par décret, qui résulte d’une atteinte à un bien autre que le produit défectueux lui-même ; qu’un produit est défectueux lorsqu’il n’offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre, c’est-à-dire lorsqu’il risque de porter atteinte à l’intégrité physique ou psychique des individus, ou bien de provoquer la destruction ou la dégradation d’un bien ; qu’en retenant, pour juger que la preuve de la défectuosité des produits n’était pas rapportée, qu’aucun danger anormal et excessif caractérisant un défaut de sécurité desdits produits n’est établi dès lors que la pollution des vins traités n’est pas de nature à nuire à la santé des consommateurs ni à leur intégrité, le vin restant inoffensif s’il est ingéré même si son goût s’avère désagréable, quand l’altération du goût des vins en raison de leur pollution par les produits en cause caractérisait un défaut de sécurité du produit, la cour d’appel a violé les articles 1386-2 et 1386-4 du code civil, désormais articles 1245-1 et 1245-3 dudit code.»
[Continúa…]