Fundamentos destacados: 1- ALORS QUE seule la faute de la victime ayant concouru directement et certainement au dommage permet de réduire son droit à indemnisation; qu’en se fondant, pour conclure à un partage de responsabilité à hauteur de 50 %, sur l’imprudence de la victime qui n’aurait pas veillé à sa propre sécurité et aurait accédé illégalement au site litigieux en dépit des précautions prétendument mises en oeuvre, tout en relevant que la perspective d’intrusions sur le site était probable pour le gardien et que l’accès aux toitures était possible et même régulier pour M. [F] et ses amis, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il s’évinçait que le dommage n’était pas imputable au comportement de M. [F] mais au seul fait de la chose, son gardien n’ayant pris aucune mesure efficace lui permettant de prévenir la réalisation du dommage, violant ainsi l’article 1382, devenu 1240, du code civil.
2- ALORS, en tout état de cause, QUE sauf si elle revêt les caractères de la force majeure, la faute de l’enfant ayant subi un dommage corporel n’a aucun effet exonératoire ; que la cour d’appel a elle-même relevé que la faute de M. [F], âgé de 12 ans au moment des faits, ne présentait pas les caractères de la force majeure ; qu’en jugeant pourtant que sa faute venait réduire de moitié son droit à indemnisation, la cour d’appel a violé l’article 1382, devenu 1240, du code civil. Moyen produit au pourvoi incident par la SARL Le Prado – Gilbert, avocat aux Conseils, pour les sociétés MMA IARD assurances mutuelles et MMA IARD
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 25 mai 2022
Cassation partielle
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 553 F-B
Pourvoi n° A 20-17.123
Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de [U] [F].
Admission du bureau d’aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 26 avril 2021.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 25 MAI 2022
La société Ville renouvelée, société anonyme d’économie mixte, dont le siège est [Adresse 5], a formé le pourvoi n° A 20-17.123 contre l’arrêt rendu le 2 avril 2020 par la cour d’appel de Douai (3e chambre), dans le litige l’opposant :
1°/ à [U] [F], domicilié [Adresse 3], mineur sous curatelle,
2°/ à l’association AGSS de l’UDAF, dont le siège est [Adresse 2], prise en qualité de curateur de [U] [F],
3°/ à la société MMA IARD assurances mutuelles, société d’assurance mutuelle à cotisations fixes, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de la société Covea risks,
4°/ à la société MMA IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de la société Covea risks,
5°/ à la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de [Localité 6] [Localité 7], dont le siège est [Adresse 4], défendeurs à la cassation.
L’association AGSS de l’UDAF et [U] [F] ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
Les sociétés MMA IARD assurances mutuelles et MMA IARD ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 6] [Localité 7] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l’appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Les demandeurs aux pourvois incidents invoquent, à l’appui de leurs recours, chacun un moyen unique de cassation, annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Pradel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de la société Ville renouvelée, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de [U] [F] et de l’association AGSS de l’UDAF, de la SARL Le Prado – Gilbert, avocat des sociétés MMA IARD assurances mutuelles et MMA IARD, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 6] [Localité 7], et l’avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l’audience publique du 5 avril 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Pradel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Douai, 2 avril 2020), le 29 octobre 2010, [U] [F], mineur, s’est blessé en chutant du toit d’un entrepôt appartenant à la société Ville renouvelée (la SAEM) et assuré par la société MMA IARD, venant aux droits de la société Covea risks.
2. Aux fins d’obtenir le remboursement de ses débours, la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 6]-[Localité 7] (la CPAM) a assigné, devant un tribunal de grande instance, la société MMA IARD, la SAEM et [U] [F], dont le curateur, l’association AGSS de l’UDAF, a été assignée ultérieurement. En cours de procédure, la société MMA IARD assurances mutuelles a déclaré intervenir volontairement à l’instance.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi principal de la SAEM et le moyen du pourvoi incident formé par les sociétés MMA IARD assurances mutuelles et MMA IARD, pris en sa deuxième branche, réunis, qui sont similaires
Enoncé des moyens
3. La SAEM fait grief à l’arrêt de la déclarer responsable des conséquences dommageables résultant du fait d’une plaque en fibrociment placée sous sa garde et ayant joué un rôle actif dans l’accident survenu le 29 juillet 2010 à [U] [F], alors «qu’on est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore par le fait des
personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde ; qu’une chose inerte peut être l’instrument du dommage seulement si la preuve qu’elle occupait une position anormale ou qu’elle était en mauvais état est rapportée ; que toutefois l’état d’entretien de la chose inerte ne peut à lui seul justifier la responsabilité du gardien lorsque, même à l’état neuf, cette chose n’est pas en mesure de supporter l’action humaine exercée contre elle ; qu’en se fondant exclusivement, pour retenir la responsabilité de la SAEM Ville Renouvelée en tant que gardien de la plaque de fibrociment placée sur le toit du bâtiment et qui a cédé sous le poids de M. [F] lorsqu’il a couru sur elle, sur le mauvais
état de ces plaques équipant le toit, tout en relevant que même sous le régime des normes de sécurité les plus récentes, il ressortait d’une documentation éditée par la MSA de Bretagne au titre de la prévention des accidents sur toiture qu’il n’est pas possible de prendre appui directement sur ce type de plaques, et a fortiori de courir sur elles, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l’article 1384 alinéa 1er du code civil dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu l’article 1242, alinéa 1er, du même code. »
4. Les sociétés MMA IARD assurances mutuelles et MMA IARD font grief à l’arrêt de déclarer la SAEM responsable des conséquences dommageables résultant du fait d’une plaque en fibrociment placée sous sa garde et ayant rempli un rôle actif dans l’accident survenu le 29 juillet 2010 à [U] [F], de dire que la faute commise par [U] [F] n’exonère que
partiellement la SAEM de sa responsabilité à son égard et de dire qu’elle sera garantie par la société MMA IARD de toutes condamnations qui seront prononcées à son encontre, alors « que subsidiairement le caractère anormal d’une chose inerte s’apprécie au regard de son état, de son comportement ou de sa position ; que ne présente pas un tel caractère
une plaque de fibrociment exempte de tout vice interne qui, à l’état neuf, n’est pas de nature à pouvoir supporter le poids d’un homme et dont il est uniquement relevé dans un rapport établi plus de huit mois après l’accident qu’elle est située sur un bâtiment en état « moyen voire vétuste » et que la couverture dont elle fait partie n’est pas affectée de «
graves désordres d’étanchéité », dont il est établi que la toiture à laquelle elle appartient date de « plusieurs dizaines d’années » et a une solidité qui « diminue au fil du temps » et dont les témoins de l’accident ont affirmé que la toiture dont elle faisait partie « était déjà fissurée » et « ne tenait pas trop » ; qu’en énonçant le contraire, la cour d’appel qui n’a
pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé l’article 1384, alinéa 1er, du code civil dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu l’article 1242, alinéa 1er, du même code. »
Réponse de la Cour Vu l’article l’article 1384, alinéa 1er, devenu 1242, alinéa 1er, du code civil :
5. Aux termes de ce texte, on est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde.
6. Pour retenir la responsabilité de la SAEM, l’arrêt relève que l’expert mentionne que l’ensemble du bâtiment est en état moyen, voire vétuste, que dans leurs conclusions, les assureurs indiquaient que la toiture était posée depuis plusieurs dizaines d’années, admettant en outre que la solidité d’une telle toiture diminue au fil du temps, qu’il résulte des déclarations de témoins directs des faits que ces derniers avaient cherché à dissuader [U] [F] d’emprunter la toiture, en l’avertissant qu’elle était déjà fissurée.
7. L’arrêt constate que les normes de sécurité Afnor produites aux débats ne permettent pas à elles seules d’établir l’existence d’un vice interne de la plaque ayant cédé sous le poids de [U] [F], alors que leur « applicabilité » à l’époque de la construction du bâtiment n’est pas établie.
8. L’arrêt en déduit qu’en conséquence d’un défaut d’entretien, le mauvais état des plaques de fibrociment équipant le toit conduit à retenir le rôle actif de la plaque ayant cédé sous le poids de [U] [F], laquelle a été ainsi l’instrument du dommage.
9. En se déterminant ainsi, en se fondant exclusivement sur le défaut d’entretien de la plaque de fibrociment pour retenir son rôle actif dans la survenance du dommage, sans mettre en évidence l’anormalité de cette chose, en recherchant si la plaque, même correctement entretenue, n’aurait pas cédé sous le poids de [U] [F], la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision.
Portée et conséquence de la cassation
10. En application de l’article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif déclarant la SAEM responsable des conséquences dommageables de l’accident en qualité de gardien du toit, emporte cassation des chefs du dispositif relatifs à l’expertise, à la faute de la victime et au partage de responsabilité en découlant ainsi que de celui
relatif à la garantie de son assureur, qui s’y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour:
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il déclare recevable la demande de la société Ville renouvelée à l’égard de la société MMA IARD, l’arrêt rendu le 2 avril 2020, entre les parties, par la cour d’appel de Douai ;
Remet, sauf sur ce point, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Douai autrement composée ;
Condamne la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 6]-[Localité 7], [U] [F] et l’AGSS de l’UDAF prise en sa qualité de curateur de [U] [F] aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mai deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat aux Conseils, pour la société Ville renouvelée
La SAEM Ville Renouvelée reproche à l’arrêt attaqué de l’avoir déclarée responsable des conséquences dommageables résultant du fait d’une plaque en fibrociment placée sous sa garde et ayant rempli un rôle actif dans l’accident survenu le 29 juillet 2010 à M. [U] [F] ;
ALORS QU’on est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde ; qu’une chose inerte peut être l’instrument du dommage seulement si la preuve qu’elle occupait une position anormale ou qu’elle était en mauvais état
est rapportée ; que toutefois l’état d’entretien de la chose inerte ne peut à lui seul justifier la responsabilité du gardien lorsque, même à l’état neuf, cette chose n’est pas en mesure de supporter l’action humaine exercée contre elle ; qu’en se fondant exclusivement, pour retenir la responsabilité de la SAEM Ville Renouvelée en tant que gardien de la plaque de
fibrociment placée sur le toit du bâtiment et qui a cédé sous le poids de M. [F] lorsqu’il a couru sur elle, sur le mauvais état de ces plaques équipant le toit, tout en relevant que même sous le régime des normes de sécurité les plus récentes, il ressortait d’une documentation éditée par la MSA de Bretagne au titre de la prévention des accidents sur toiture qu’il n’est pas possible de prendre appui directement sur ce type de plaques, et a fortiori de courir sur elles, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l’article 1384 alinéa 1er du code civil dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu l’article 1242, alinéa 1er, du même code.
Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour [U] [F] et
l’association AGSS de l’UDAF
L’AGSS de l’UDAF, prise en sa qualité de curateur de M. [F], et M. [F], font grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR dit que la faute commise par M. [F] exonérait partiellement la SAEM Ville Renouvelée de sa responsabilité à son égard et d’AVOIR
prononcé, par conséquent, un partage de responsabilité à hauteur de 50 % entre M. [F], d’une part, et la SAEM Ville Renouvelée, d’autre part ;
1- ALORS QUE seule la faute de la victime ayant concouru directement et certainement au dommage permet de réduire son droit à indemnisation ; qu’en se fondant, pour conclure à un partage de responsabilité à hauteur de 50 %, sur l’imprudence de la victime qui n’aurait pas veillé à sa propre sécurité et aurait accédé illégalement au site litigieux en dépit des précautions prétendument mises en oeuvre, tout en relevant que la perspective d’intrusions sur le site était probable pour le gardien et que l’accès aux toitures était possible et même régulier pour M. [F] et ses amis, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il s’évinçait que le dommage n’était pas imputable au comportement de M. [F] mais au seul fait de la chose, son gardien n’ayant pris aucune mesure efficace lui permettant de prévenir la réalisation du dommage, violant ainsi l’article 1382, devenu 1240, du code civil.
2- ALORS, en tout état de cause, QUE sauf si elle revêt les caractères de la force majeure, la faute de l’enfant ayant subi un dommage corporel n’a aucun effet exonératoire ; que la cour d’appel a elle-même relevé que la faute de M. [F], âgé de 12 ans au moment des faits, ne présentait pas les caractères de la force majeure ; qu’en jugeant pourtant que sa faute venait réduire de moitié son droit à indemnisation, la cour d’appel a violé l’article 1382, devenu 1240, du code civil.
Moyen produit au pourvoi incident par la SARL Le Prado – Gilbert, avocat aux Conseils, pour les sociétés MMA IARD assurances mutuelles et MMA IARD
Les sociétés MMA IARD Assurances mutuelles et MMA IARD reprochent à l’arrêt infirmatif attaqué,
D’AVOIR déclaré la SAEM Ville renouvelée responsable des conséquences dommageables résultant du fait d’une plaque
en fibrociment placée sous sa garde et ayant rempli un rôle actif dans l’accident survenu le 29 juillet 2010 à M. [U] [F],
D’AVOIR dit que la faute commise par M. [F] n’exonère que partiellement de la SAEM Ville renouvelée de sa responsabilité à son égard et D’AVOIR dit que la SAEM Ville renouvelé sera garantie par la société MMA Iard de toutes condamnations qui seront prononcées à son encontre ;
1/ ALORS QUE le juge doit, même d’office, vérifier si les conditions d’application de la loi sont réunies et, en matière de responsabilité, vérifier si les conditions de mise en jeu de la responsabilité sont réunies ; que la faute de la victime à l’origine exclusive de son dommage fait obstacle à la mise en oeuvre de la responsabilité du gardien d’une chose inerte, sans qu’elle ait à revêtir le caractère de la force majeur ; qu’en déclarant que la responsabilité de la SAEM Ville renouvelée du fait de la plaque de fibrociment était établie, sans vérifier si les nombreuses fautes qu’elle avait retenues à l’encontre de la victime M. [F] qui avait accédé à un site sécurisé, escaladé une clôture de deux mètres de hauteur puis deux murs, suivi un cheminement complexe et dangereux, bravé une interdiction manifeste de pénétrer dans les locaux, passé outre les avertissements de deux témoins et couru sur une surface dont il connaissait la fragilité, n’étaient pas la cause exclusive de son dommage, et si le lien de causalité entre le dommage et le mauvais entretien de la plaque n’était pas dès lors rompu, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1384, alinéa 1er, du code civil dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, devenu l’article 1242, alinéa 1er, du même code ;
2/ ALORS QUE subsidiairement le caractère anormal d’une chose inerte s’apprécie au regard de son état, de son comportement ou de sa position ; que ne présente pas un tel caractère une plaque de fibrociment exempte de tout vice interne qui, à l’état neuf, n’est pas de nature à pouvoir supporter le poids d’un homme et dont il est uniquement relevé
dans un rapport établi plus de huit mois après l’accident qu’elle est située sur un bâtiment en état « moyen voire vétuste » et que la couverture dont elle fait partie n’est pas affectée de « graves désordres d’étanchéité », dont il est établi que la toiture à laquelle elle appartient date de « plusieurs dizaines d’années » et a une solidité qui « diminue au fil du temps » et dont les témoins de l’accident ont affirmé que la toiture dont elle faisait partie « était déjà fissurée » et « ne tenait pas trop » ; qu’en énonçant le contraire, la cour d’appel qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé l’article 1384, alinéa 1er, du code civil dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, devenu l’article 1242, alinéa 1er, du même code. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 6] [Localité 7]
La CPAM de [Localité 6] – [Localité 7] fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR dit que la faute commise par M. [F] exonérait partiellement la SAEM Ville Renouvelée de sa responsabilité à son égard et d’AVOIR prononcé, par conséquent, un partage de responsabilité à hauteur de 50 % entre M. [F], d’une part, et la SAEM Ville Renouvelée, d’autre part ;
1- ALORS QUE seule la faute de la victime ayant concouru directement et certainement au dommage permet de réduire son droit à indemnisation ; qu’en se fondant, pour conclure à un partage de responsabilité à hauteur de 50 %, sur l’imprudence de la victime qui n’aurait pas veillé à sa propre sécurité et aurait accédé illégalement au site litigieux en dépit des précautions prétendument mises en oeuvre, tout en relevant que la perspective d’intrusions sur le site était probable pour le gardien et que l’accès aux toitures était possible et même régulier pour M. [F] et ses amis, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il s’évinçait que le dommage n’était pas imputable au comportement de M. [F] mais au seul fait de la chose, son gardien n’ayant pris aucune mesure efficace lui permettant de prévenir la réalisation du dommage, violant ainsi l’article 1382, devenu 1240, du code civil.
2- ALORS, en tout état de cause, QUE sauf si elle revêt les caractères de la force majeure, la faute de l’enfant ayant subi un dommage corporel n’a aucun effet exonératoire ; que la cour d’appel a elle-même relevé que la faute de M. [F], âgé de 12 ans au moment des faits, ne présentait pas les caractères de la force majeure ; qu’en jugeant pourtant que sa faute venait réduire de moitié son droit à indemnisation, la cour d’appel a violé l’article 1382, devenu 1240, du code civil.