Fundamento destacado: 7. La cour d’appel a, par motifs propres et adoptés, constaté, d’une part, que Mme [F] avait engagé plusieurs procédures destinées à se maintenir dans les lieux et qu’elle avait informé son agent immobilier dès octobre 2016 de son refus de vendre, d’autre part, qu’elle n’avait pas informé M. et Mme [T] de la procédure de saisie immobilière engagée le 8 novembre 2017, de sorte que des échanges s’étaient poursuivis fin 2018 comme si le bien était toujours en vente.
8. De ces constatations souveraines, elle a pu déduire l’existence d’une faute à l’origine du préjudice de M. et Mme [T], constitué par leur confrontation, pendant plusieurs années, au comportement de Mme [F] ainsi qu’aux aléas d’une situation source d’anxiété, alors qu’ils espéraient acquérir le terrain convoité.
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
Audience publique du 21 décembre 2023
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 833 F-D
Pourvoi n° D 22-22.516
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21
DÉCEMBRE 2023
Mme [K] [F], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 22-22.516 contre l’arrêt rendu le 7
octobre 2022 par la cour d’appel de Paris (pôle 4, chambre 1), dans le litige l’opposant :
1°/ à Mme [D] [S], épouse [T],
2°/ à M. [A] [T],
tous deux domiciliés [Adresse 3],
3°/ à M. [C] [R], domicilié [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Rat, conseiller référendaire, les observations de Me Guermonprez, avocat de
Mme [F], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. et Mme [T], après débats en l’audience
publique du 14 novembre 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Rat, conseiller référendaire rapporteur, M. Delbano, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 7 octobre 2022) et les productions, M. [R] et Mme [F] ont, le 14 mai 2016, donné mandat à un agent immobilier de vendre leur propriété en deux lots composés, l’un,
d’une maison d’habitation, l’autre, d’un terrain nu.
2. Le 14 mai 2016, M. et Mme [T] ont émis une offre d’achat sur le lot libre de toute construction et attenant à leur propriété, au prix de 183 000 euros, sous conditions suspensives d’autorisation de division de la parcelle et d’obtention d’un prêt, ces conditions ayant été stipulées sans délai.
3. Le 8 novembre 2017, la Caisse d’épargne a fait délivrer à M. [R] et Mme [F] un commandement de payer valant saisie immobilière de l’intégralité de la propriété.
4. Le 24 mars 2018, M. et Mme [T] ont réitéré leur volonté d’acquérir le lot libre de toute construction et de renoncer à la condition suspensive d’obtention d’un prêt, puis ont assigné Mme [F] et M. [R] aux fins de réitération forcée de la vente, et de paiement de diverses sommes à titre de dommages-intérêts.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses première et quatrième branches
5. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à
entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches
Enoncé du moyen
6. Mme [F] fait grief à l’arrêt de la condamner à payer à M. et Mme [T] diverses sommes à titre de dommages-intérêts et au titre des frais irrépétibles, alors :
« 2°/ que la responsabilité civile délictuelle d’une partie envers une autre nécessite la démonstration d’une faute de celui dont la responsabilité est recherchée, d’un préjudice de la victime alléguée et d’un lien causal direct et certain entre cette faute et ce préjudice ; qu’à l’appui de leur décision, les juges du fond ont estimé que Mme [F] avait engagé sa responsabilité envers les époux [T] en «
engageant plusieurs procédures dont la finalité était de se maintenir dans les lieux et d’éviter la vente du bien qu’elle occupait » ; qu’en statuant ainsi, les juges du fond n’ont pas tiré les conséquences légales de leurs constatations d’où il résultait que la non réalisation de la vente au profit des époux [T] n’était pas due aux procédures engagées par Mme [F] mais au délai inhabituellement long de près de deux ans mis par les époux [T] pour renoncer à la condition
suspensive de l’obtention d’un prêt stipulée à leur profit exclusif, délai au cours duquel, un an et demi après leur offre d’achat sous cette condition suspensive du 14 mai 2016, le bien immobilier
s’est trouvé indisponible pour une vente de gré à gré en raison de la saisie immobilière dont il a fait l’objet le 8 novembre 2017, violant l’article 1240 du code civil ;
3°/ que seule une faute de celui dont la responsabilité est recherchée à l’origine du préjudice allégué peut engager sa responsabilité ; qu’à l’appui de leur décision, les juges du fond ont estimé qu’après la décision des époux [T] du 24 mars 2018 de renoncer à la condition suspensive de l’obtention d’un prêt, Mme [F] leur aurait dissimulé que le bien immobilier était devenu indisponible depuis le 8
novembre 2017 en raison de la saisie dont il avait fait l’objet, laissant croire aux époux [T] durant la fin de l’année 2018 que le bien était toujours en vente ; qu’en statuant ainsi tout en constatant que les
époux [T] étaient intervenus volontairement à la procédure de saisie immobilière devant le juge de l’exécution qui a déclaré leur intervention irrecevable par jugement d’orientation du 20 décembre
2018, ces derniers ayant au surplus expressément admis dans leurs conclusions d’appel qu’ils avaient été informés de cette saisie le 9 octobre 2018, la cour d’appel a violé l’article 1240 du code civil. »
Réponse de la Cour
7. La cour d’appel a, par motifs propres et adoptés, constaté, d’une part, que Mme [F] avait engagé plusieurs procédures destinées à se maintenir dans les lieux et qu’elle avait informé son agent immobilier dès octobre 2016 de son refus de vendre, d’autre part, qu’elle n’avait pas informé M. et Mme [T] de la procédure de saisie immobilière engagée le 8 novembre 2017, de sorte que des échanges s’étaient poursuivis fin 2018 comme si le bien était toujours en vente.
8. De ces constatations souveraines, elle a pu déduire l’existence d’une faute à l’origine du préjudice de M. et Mme [T], constitué par leur confrontation, pendant plusieurs années, au comportement de
Mme [F] ainsi qu’aux aléas d’une situation source d’anxiété, alors qu’ils espéraient acquérir le terrain convoité.
9. Le moyen n’est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi,
Condamne Mme [F] aux dépens.
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme [F] et la condamne à payer à M. et Mme [T] une somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un décembre deux mille vingt-
trois.ECLI:FR:CCASS:2023:C300833